Par le traité des Pyrénées de 1659, la frontière entre la France et les Pays-Bas espagnols est modifiée. Plusieurs places-fortes deviennent françaises laissant entre Mons et Namur un large couloir sans défenses en direction de Bruxelles. Dès l’année suivante, en 1660, le gouverneur des Pays-Bas espagnols, Luis de Benavides Carrillo, charge trois ingénieurs H. Jannsens, Salomon Van Es et Jean Boulanger, de prospecter sur le cours de la Sambre, un endroit pouvant convenir à la construction d’une forteresse pour fermer la trouée de l’Oise. Le village de Dampremy est un des rares endroits pouvant convenir. Il se situe sur la Sambre, appartient au comté de Namur et donc aux Pays-Bas et non à la Principauté de Liège. L’affaire traine un peu, mais en 1664, le marquis Francisco de Castel Rodrigo devient gouverneur, et il veut renforcer les défenses militaires. D’autant plus que la menace française se précise. À la mort du roi Philippe IV d’Espagne le 17 septembre 1665, Louis XIV fait valoir les droits de son épouse et fille de Philippe IV, Marie-Thérèse, sur les Pays-Bas : ce sont les prémisses de la guerre de Dévolution. Francisco de Castel Rodrigo charge donc Salomon Van Es de dresser les plans d’une forteresse sur la Sambre. Lorsque l’ingénieur remet son projet, ce n’est pas à Dampremy qu’il propose d’installer la forteresse mais dans le petit village à côté, Charnoy. Situé dans une boucle de la Sambre, dominé par un plateau cerné de trois côtés par des pentes abruptes, l’endroit offrait des conditions stratégiques idéales. En juillet 1666, la population de Charnoy est évacuée et tout ce qui peut gêner les travaux est démolis. Les adjudications des travaux sont terminées le 10 août et les tâches répartis entre 14 entrepreneurs. La gestion des finances est confiées à Pontian d’Harscamp, receveur général de Namur, et à son père Vincent. Les arbres et haies sont abattus pendant la seconde moitié du mois d’août. Plusieurs places-fortes deviennent françaises laissant entre Mons et Namur un large couloir sans défenses en direction de Bruxelles. Le marquis Francisco de Castel Rodrigo, gouverneur des Pays-Bas en 1664, veut renforcer les défenses militaires. Le village de Charnoy, le long de la Sambre, est un des rares endroits propices à l’installation d’une forteresse et appartenant au Comté de Namur (donc aux Pays-Bas). Le gouverneur générale installe trois régiments d’infanterie dans la vallée du ruisseau de Lodelinsart, une unité de cavalerie à Fleurus et une compagnie de gardes dans les villages voisins. Il fait aussi venir des munitions et 27 pièces d’artillerie. Lui-même s’installe à Dampremy le 15 septembre. Dès lors, les travaux s’accélèrent. Plus de 900 ouvriers répartis en 14 équipes de 30 à 130 personnes, sont engagés de gré ou de force. Pour hâter la construction, toute la circulation du comté est paralysée. Les eaux des affluents et des étangs sont lâchées pour grossir la Sambre qui sert à l’acheminement de pierre de taille depuis Dinant et Namur. Les abbayes doivent laisser le passage dans leurs eaux. L’abbaye de Soleilmont reçoit l’ordre d’accommoder le chemin royal de Fleurus. La région de Fleurus fournit la chaux jusqu’à la construction de chaufours à Charleroi même. Au début de 1667 se dresse une enceinte hexagonale munie de six bastions et des murailles hautes d’une dizaine de mètres. Il y a quatre demi-lunes. L’intérieur de la place n’a aucun aménagement excepté un puits et quelques maisons de terre. Vers mars ou avril, l’église du village de Charnoy, toujours debout, est rasée et le vallon de Lodelinsart est coupé et mis sous eau. Le 7 avril, commence la construction des contrescarpes et des palissades. Le 2 mai commence la construction d’un ouvrage à corne vers le sud-ouest, mais cet ouvrage ne sera pas achevé. Dès le début de la construction, informé par des espions, Louis XIV décide de prendre Charleroy. Devant la menace, Castel Rodrigo envisage d’abandonner et même de démolir la forteresse qui a coûté 28 % de la recette moyenne pour les années 1665 à 1667. Les derniers soldats espagnols quittent les lieux le 27 mai 1667. Le 10 mai 1667, Turenne prend le commandement d’une armée de 50 000 hommes en Picardie. Le 20, le roi rejoint ses troupes et le 21, l’armée entre en campagne et envahit les Pays-Bas. Elle arrive devant Charleroi le 31 et y découvre un paysage désolé dont elle prend possession sans coup férir. La prise est cependant importante car Charleroi constitue une tête de pont sur la rive gauche de la Sambre en direction du Brabant. Le 2 juin, Louis XIV entre dans Charleroi et en ordonne la reconstruction. Les ouvrages d’art sont alors parfaits et agrandis par Thomas de Choisy, Vauban donnant quelques indications pour les demi-lunes au nord et à la ville basse. Par la paix d’Aix-la-Chapelle, Charleroi est attribuée à la France et Louis XIV accorde des privilèges aux habitants de la nouvelle ville en vue de la développer. Les ouvrages d’art sont alors parfaits et agrandis par Thomas de Choisy, Vauban donnant quelques indications pour les demi-lunes au nord et à la ville basse. Par la paix d’Aix-la-Chapelle, Charleroi est attribuée à la France et Louis XIV accorde des privilèges aux habitants de la nouvelle ville (terrain offert gratuitement, primes à la construction, etc.) en vue de la développer. En 1671, Vauban fournit le plan des portes monumentales. Il propose de bâtir des nouvelles redoutes détachées sur les étangs à l’est et à l’ouest de la ville, outre un pont sur la Sambre: leur réalisation est postposée; elle intervient en tout cas avant 1678 et la restitution de la ville à l’Espagne comme l’indiquent les plans manuscrits. En 1672, Vauban dessine le plan d’un quartier neuf, la ville basse, sur la rive droite de la Sambre. L’enceinte formant un trapèze à trois bastions à flancs droits est achevée en 1675. Commence alors le lotissement en damier irrégulier, trame préférée par Vauban qui a critiqué le parti de la ville haute. En 1673, la ville s’étend sur la rive droite de la Sambre, qui deviendra la « ville basse », par opposition à la forteresse existante placée sur les hauteurs, portant logiquement le nom de « ville haute ». Des redoutes carrées sont ajoutées ensuite par Vauban, à l’extérieur des glacis, afin de défendre les zones inondables. La ville est assiégée à plusieurs reprises avant d’être concédée à l’Espagne par le traité de Nimègue de 1678. En 1692, la ville est bombardée par les armées françaises, puis l’année suivante, elle est prise par Vauban, sous le regard de Louis XIV qui en reprend le contrôle. Pour la première fois, les troupes françaises sont équipées de fusils conformes aux souhaits de Vauban. Ce dernier ne se résout en effet pas à perdre la place qui verrouille Sambre et Meuse et représente un poste avancé vers Bruxelles. C’est Thomas de Choisy qui dirige ces travaux, spécialement mandaté par Louvois bien que l’ «Abrégé des services du maréchal de Vauban », rédigé en 1703, mentionne la participation du grand ingénieur aux fortifications de Charleroi en 1668, il ne semble intervenir de façon créatrice qu’après 1672. Vauban est en charge de développer la ville dont il agrandi les limites. Il établira deux projets en partie réalisés en 1693 (3 novembre) et 1696 (16 mars et 25 août). Un plan-relief de la ville de Charleroi a été établi en 1695. Il est conservé et exposé au sous-sol du Musée des Beaux-Arts de Lille. Il est composé de 4 tables en bois pour un total de 4 x 3 m à l’échelle 1/600°. Une copie se trouve dans l’Hôtel-de-Ville de Charleroi. Prise et reprise, elle passe aux Espagnols au Traité de Ryswick (1697), retourne à la France, est occupée par les Provinces-Unies puis restituée au Saint-Empire par le Traité de Baden (1714). Elle est reprise par le prince de Conti en 1745. Finalement elle est rendue au Saint-Empire en 1748, à la condition que les forteresses soient démantelées. La ville connait alors 45 ans de prospérité, sous Joseph II. En décembre 1790 commence la révolution brabançonne et Charleroi connaît une nouvelle période de troubles : les Impériaux occupent la ville le 25 décembre; ils cèdent la place aux vainqueurs français de Jemappes le 8 novembre 1792 (les Français l’occupent le 12 novembre 1792) avant de la reprendre le 28 mars 1793 (les Français l’ayant abandonnée le 25 mars 1793 après la défaite de Neerwinden). Charleroi, dès l’arrivée des Français, proclame sa sécession du Comté de Namur. Elle demande plus tard, alors qu’il est question de créer les États belgiques unis, d’être plutôt rattachée directement à la France. En 1794, le général Charbonnier met le siège devant la ville mais est repoussé. C’est Jourdan qui parvient à prendre la place après six jours d’un bombardement intensif. C’est pendant la prise de Charleroi et la bataille de Fleurus qu’on eut recours pour la première fois à l’observation aérienne, depuis Jumet (lieu-dit Belle-Vue), d’un champ de bataille depuis un aérostat. Sous le régime français révolutionnaire, la ville changera de nom à plusieurs reprises : Char-sur-Sambre, Charles-sur-Sambre et encore Libre-sur-Sambre, entre les 25 juin 1794 et 8 mars 1800. Peu avant la bataille de Waterloo de 1815, les Carolorégiens très « francophiles » accueillent avec enthousiasme les troupes françaises qui récupèrent la cité faisant désormais partie du « Royaume uni des Pays-Bas ». Mais Napoléon essuie une défaite plus au nord, à la célèbre bataille de Waterloo, le 18 juin 1815. Quarante-huit heures plus tard, Charleroi recueille les débris de la Grande Armée ; le 19 juin à 5 heures, Napoléon est dans la ville avant de continuer vers Paris. Pour se protéger de la France, la ville se verra dans l’obligation de construire de nouveaux murs qui la tiendront dans un étroit carcan pendant cinquante ans. En 1914, la ville échappe à la destruction complète moyennant le payement d’une lourde indemnité de guerre imposée par le général Max von Bahrfeldt.